Les plateformes logistiques accélèrent leur implantation à Angers

Angers affirme sa position de leadership au carrefour logistique du Grand Ouest de la France. Sa proximité avec Paris, le littoral, la Bretagne, le Centre et Bordeaux, son bassin d’emploi ultra favorable et la stratégie foncière et économique mise en place par les pouvoirs publics expliquent ce coup d’accélérateur.

En septembre, le discounter Action ouvrait son premier magasin à Angers. Trop étroits pour contenir la ruée des clients impatients, les rayons ne désemplissent toujours pas. Une folie douce, précédée d’une impatience quasi hystérique sur les réseaux sociaux, sur lesquels les dirigeants du groupe néerlandais assoient confortablement leur stratégie de communication.
Quelques mois auparavant déjà, le groupe néerlandais avait créé l’événement à Angers en annonçant l’ouverture d’une plateforme logistique de 56 000 m2, début 2020, aux portes Est de la ville sur une emprise de 15 ha. 550 emplois minimum sont à la clé dans « un horizon très proche ». Bonne pioche pour Angers qui n’avait pas vu arriver tel client depuis l’installation de Scania Production en 1992.

Leroy Merlin implantera sa plateforme Grand Ouest à Angers

Depuis, les annonces se suivent et se ressemblent. Quand ce n’est pas pour annoncer l’ouverture d’un centre relation client – comme Coriolis l’a fait voici un mois – c’est pour informer de l’implantation d’une base logistique.
La dernière date du 22 octobre et provient de Leroy Merlin. Le géant du bricolage a confirmé que son hub Grand Ouest fonctionnerait dès janvier 2019, à Angers, avec un contingent de 150 emplois dans les trois ans. Sa gestion sera confiée à XPO Logistics, le logisticien international, présent sur le territoire, et qui fait travailler près de 8 000 personnes en France.

« C’est toujours la même histoire. L’objectif, c’est de rapprocher les stocks des clients. La plateforme d’Angers livrera trente magasins, de la pointe bretonne jusqu’à La Rochelle, Rennes, Tours, Orléans, assure Olivier Vasseur, directeur des opérations logistiques pour Leroy Merlin France.
Cela fait une dizaine d’années que nous voulons nous installer à Angers. Sa position géographique et son réseau autoroutier sont idéaux, mais ce qui a de nous convaincre, c’est le bâtiment que PRD va livrer à la fin de cette année. »

Une plateforme logistique à 25 millions d’euros

En février dernier, l’annonce de cette construction par PRD, le leader français des bâtiments logistiques, avait déjà fait date. Ce type d’équipement – grand comme cinq terrains de foot – borde généralement ce que les spécialistes appellent la « dorsale logistique » historique française Lille-Paris-Lyon-Marseille.
Fin 2018, ce hub sera ainsi le plus important par sa taille, en France, à être sorti de terre ces dix dernières années, ailleurs que dans ces grandes métropoles. Autre indicateur d’attractivité pour le territoire angevin, ce bâtiment a été construit « à blanc », c’est à dire avant d’avoir trouvé locataire. 25 millions d’euros que le financeur STAM Europe n’a pas hésité à investir en terre angevine. « Cela constituait un risque, mais un risque mesuré. L’implantation de Leroy Merlin et XPO Logistics au sein de cet entrepôt de classe A conforte notre stratégie d’investissement dans le Grand Ouest. C’est un grand succès pour tous les acteurs du projet », commente aujourd’hui Stéphane Géroult, directeur de l’Asset Management Logistique de STAM Europe, avant d’ajouter « avoir eu d’autres contacts avec des entreprises intéressées pour louer la plateforme angevine ».

L’arme fatale d’Angers

Angers serait-elle en train de devenir LE carrefour logistique du Grand Ouest ?
Courant 2019, Giphar, le réseau de pharmaciens d’officine,  ouvrira son hub dédié au Grand Ouest, à l’ouest d’Angers. A la clé : 70 premiers emplois et 7 millions d’euros d’investissement.
Dans la même veine, le commissionnaire de transport allemand Dachser faisait aussi le choix d’Angers, en mars 2017, et plus exactement de la zone d’activité Est d’Angers-Marcé – proche de l’aéroport  – pour déployer son activité transport et logistique au départ et à destination de la Sarthe, de la Mayenne et du Nord Maine-et-Loire.
Dix-huit mois après, le responsable du site, Frédéric Bas confirme que ce choix était le bon. « La plateforme est en plein développement, ce qui nous amène à recruter en ce moment. »
En emmenant tous ces projets et bonnes nouvelles dans sa manche, en mars dernier, au Salon international du transport et de la logistique à Villepinte, Angers s’est encore distinguée. Elle est une des rares collectivités de cette taille à y tenir un stand depuis dix ans.
Angers aurait-elle l’arme fatale pour séduire vite et bien les clients à l’installation ? « Souvent, les entreprises du secteur sont à la recherche de terrains voire de bâtiments immédiatement disponibles », témoignait, voici quelques mois, Stéphane Guéroult de STAM Europe. « Le fait que la plateforme de PRD soit prête fin 2018 a fini de nous convaincre, il fallait aller vite… », confirme Olivier Vasseur de Leroy Merlin France.
En la matière, Angers sait faire. Raison pour laquelle le maire d’Angers et président de la Communauté urbaine Angers Loire Métropole, Christophe Béchu, appelle de ses voeux la modification du Schéma de cohérence territoriale (Scot), en 2019. Un passage administratif obligé pour dégeler du fonier et anticiper les besoins à venir. « Nous avons encore des terrains pour accueillir des entreprises, mais ce qu’il nous faut mettre en réserve, ce sont de grands terrains », préconise l’édile. Entre autres pistes, celle de modifier le classement de certaines emprises situées aux abords du centre commercial l’Atoll à Angers-Beaucouzé et réservés à de l’activité commerciale, n’est pas à exclure.

La logistique s’inscrit dans la stratégie économique du territoire angevin depuis près de vingt ans

Cette stratégie économique et foncière ne date pas d’hier. Tout a commencé au début des années 2000. De grandes entreprises angevines cherchaient alors à repositionner leurs hubs logistiques comme Cointreau. A l’époque, les grands acteurs de la filière tels DHL, ont investi des plateformes « nouvelle génération », de même que les entreprises de la messagerie comme XPO Logistics, Chronopost, Géodis, Heppner, Schenker.
Car une plateforme logistique peut répondre à des besoins divers. C’est le cas du groupe Action qui y voit l’occasion de gagner en proximité avec ses clients et de structurer le déploiement fulgurant de ses enseignes dans le Grand Ouest. C’est aussi le cas de Système U qui, voici quelques années, choisissait le territoire d’Angers pour approvisionner ses magasins de l’Ille-et-Vilaine jusqu’au Loiret. Ici aussi, les dimensions sont gigantesques : 600 000m2, 500 mètres de long pour 80 portes de chargement.

Comment Angers est devenue l’un des plus importants carrefours logistique du Grand Ouest

Alors, Angers premier site logistique de l’Ouest ? Avec 60 entreprises et près de 2 500 emplois, la filière logistique et transport confirme sa présence en force sur la métropole. Les chiffres de l’emploi aussi avec une hausse de 4,3% dans ce secteur entre 2016 et 2017. A ce jour, ils représentent 6% des emplois.
Comment expliquer qu’Angers séduise les poids lourds de l’économie, mieux que ses concurrentes directes, Le Mans et Rennes, par exemple ? « Angers bénéficie d’un positionnement géographique quasi idéal, aussi près de Paris que du littoral, que vient amplifier un réseau autoroutier particulièrement dense au carrefour des autoroutes A 11, A 87, A 85, et à moins de 100 km de grands bassins de population que sont Rennes, Nantes, Tours, Le Mans et Poitiers », résume L’Usine nouvelle.

« Le cadre réglementaire impose aux transporteurs de ne pas rouler plus de 4h30 sans arrêt, explique-t-on à Aldev, l’Agence de développement économique d’Angers Loire Métropole. D’Angers, on peut donc rejoindre Paris, toute la Bretagne, descendre jusqu’à Bordeaux. »

L’excellence de la formation rend le bassin d’emplois hyper favorable

Autre atout qu’il faut rendre au territoire angevin et qu’a salué Wouter de Baker, le directeur général du groupe Action en juin dernier lors de sa venue à Angers : son bassin d’emplois favorable. Les entreprises angevines de la filière rencontrent moins de difficulté à recruter, comparé à d’autres secteurs.
En ce domaine, il faut dire que le terrain est particulièrement bien préparé. Quinze structures se partagent la formation sur les métiers du transport et de la logistique. Du CAP au Master 2, qu’elles soient courtes, en alternance ou supérieures, ces formations sont qualifiantes et diplômantes. En juin dernier, on estimait à 6 800 le nombre de personnes disponibles sur le marché pour intégrer un emploi sur ce type de métier.
Autres explications : la reprise économique qui, à Angers comme ailleurs, se fait réellement sentir ; et la qualité de vie que l’hebdo L’Express a de nouveau salué à la rentrée en désignant Angers comme la 1ère ville de France où il fait bon vivre. « Aujourd’hui, les regards se tournent vers Angers quand il s’agit d’investir, ce n’était pas le cas hier », résume le maire, Christophe Béchu.
Enfin, comment ne pas boucler la boucle en évoquant le rapport particulier qui unit Angers au monde du transport depuis vingt-cinq ans, période à laquelle le poids lourd suédois des poids lourds, Scania Production, choisissaient (déjà) Angers pour implanter son unité d’assemblage. A ce jour, l’effectif dépasse les 700 salariés et l’entreprise bat tous les records de production avec près d’une centaine de camions assemblés chaque jour.